jeudi 24 janvier 2008

 

UNE VIE, PETITE-M.Houellebech








Je me suis senti vieux peu après ma naissance;

Les autres se battaient, désiraient, soupiraient;

Je ne sentais en moi qu'un informe regret.

Je n'ai jamais rien eu qui ressemble à l'enfance.


Au fond de certains bois, sur un tapis de mousse,

Des troncs d'arbres écoeurants survivent à leurs feuilles;

Autour d'eux se développe une atmosphère de deuil;

Leur peau est sale et noire, des champignons y poussent.


Je n'ai jamais servi à rien ni à quiconque;

C'est dommage.On vit mal quand on vit pour soi-même.

Le moindre mouvement constitue un problème,

On se sent malheureux et cependant quelconque.


On se meut vaguement, comme un animalcule;

On n'est presque plus rien,et pourtant qu'est-ce qu'on souffre!

On transporte avec soi une espèce de gouffre

Portatif et mesquin, vaguement ridicule.


On ne croit plus vraiment que la mort soit funeste;

Surtout pour le principe, de temps en temps on rit;

On essaie vainement d'accéder au mépris.

Puis on accepte tout et la mort fait le reste.


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